Sans jamais nous connaître

Sur le quai de la gare, il pleut et je t’attends une rose à la main.

Tu ne m’as jamais vu, je ne connais pas non plus ton visage.

Cette rose qui me donne l’air nunuche sera notre signe de reconnaissance.

Oseras tu m’aborder?

J’ai le coeur qui bât la chamade.

Je fais tout ce que je peux pour cacher mon trouble.

Comme je dois avoir l’air niais!

Le train arrive.

Mes jambes vont me lâcher c’est sûr.

Sourire!

Gonfler la poitrine et prendre un air plus sûr de soi.

Sur le quai , en face, les wagons se vident de leurs voyageurs.

Tu es dans cette foule.

Mais qui es tu ? La blonde? La brune? La petite? La grande? La mince? La ronde?

La foule s’est engouffrée dans le tunnel souterrain.

Tu vas en émerger d’un instant à l’autre, me sourire et me tendre ta joue.

Ainsi je vais connaître d’un seul coup ton parfum et la douceur de ta peau.

Je scrute maintenant les regards de toutes les femmes qui s’avancent vers moi.

Peu à peu le flot des voyageurs se calme…et tu n’es pas là.

Il n’y a plus personne…J’en étais sûr… C’était trop beau…Tous les doutes sont désormais permis.

ça fait comme un grand trou noir dans ma tête… Et je me traite de tous les noms.

Soudain dans le haut-parleur:  » En raison des mauvaises conditions météorologiques le train 5635 en provenance de Marseille aura cinq minutes de retard. »

5635? 5635?

Mais oui… le train? Ce n’est pas le bon train.

Mon sang se remet à circuler dans mes veines …Et mes mains à trembler.

Sans jamais nous connaître

Titre emprunté au magnifique film de Andrew Haigh

Techniques mixtes sur papier ( 50X65 cm )